Le Fauvisme en questions

Un village, qu’est-ce que c’est ? Une succession d’habitations, plus ou moins alignées, avec des perspectives plus ou moins nettes et parfaites. Une maison, qu’est-ce que c’est ? Des murs de pierre le plus généralement, des ouvertures – que l’on appelle portes, fenêtres, baies – et un toit de tuiles ou d’ardoises, en pente ou plat, selon la région ou le pays. Mais pour le Fauvisme, un village c’est tout autre chose. Si nous restons dans l’exemple de l’architecture, les bâtiments gris ou bruns vont être d’une couleur diamétralement opposée à ce que l’œil voit. Pourquoi ? Parce que ce mouvement pictural naît à une époque où la photographie, en noir et blanc, existe déjà. Il n’est donc pas question de remplacer maintenant un outil performant qui, lui-même, a charge de contribuer à diluer l’Académisme en déclin. Le négatif, propre à la photographie, ne sera d’aucune façon sublimé par les Fauves. Déformé oui, comme quelque chose de l’ordre de la dilution, procédé que l’on peut retrouver – en apparence – lorsqu’un film est développé. Mais tout sauf la chambre noire, significative de l’objectif et en lien étroit avec celui-ci. Ainsi, le village représenté sur la toile par les héritiers de « L’école de Chatou » est explicitement soumis à la tourmente. Alors qu’encore une fois, l’expression qui s’en dégage n’a de cesse de rappeler que le portrait ou le paysage sera désormais confié à l’humain qui aura l’art de calculer son angle de prise de vue pour que la pellicule révèle, en instantané, un moment éphémère mais qui appartient – en son principe – aux technologies qui vont révolutionner le XXème siècle. À l’opposé de l’art, implicite, qui n’a pas pour dessein de révolutionner quoi que ce soit mais qui fait lui-même sa révolution passive… La méthode fauviste regarde les ouvertures d’un œil en opposition avec le faire-semblant : les cheminées des maisons du village s’effondrent puisque viendra un temps où elles s’effondreront. Le Fauvisme est réaliste car il sait que l’être humain, pour que le monde change à bon escient – c’est-à-dire évolue –, doit un jour ou l’autre laisser sa place.

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